Grille-matière en 2025 : la place de la musique

Grille-matière en 2025 : la place de la musique

À l’aube de février

Février arrive à grands pas et voilà que la grille-matière 2025-2026 sera soumise à la prochaine réunion du Conseil d’établissement pour approbation.

Elle a probablement déjà été votée durant une de vos rencontres d’équipe en décembre dernier, ou le sera sous peu. Pour certain·e·s, cela est un moment stressant, car la décision aura une incidence directe sur votre tâche de la prochaine année scolaire.

À grande échelle

Nous sommes tous unanimes lors de nos conversations sur la promotion de notre matière, il faudrait une uniformité au niveau provincial. C’est-à-dire que le nombre de minutes allouées au cours de musique soit le même dans toutes les écoles du Québec. Cette proposition ne semble pas envisageable pour l’instant : le système est trop dense, trop saturé, il y a trop de paramètres à prendre en compte, etc.

On s’entend qu’en tant qu’individu, on se sent impuissant car l’influence que nous avons sur les décisions gouvernementales est bien minime, voire nulle.

Peut-être qu’un standard au niveau de notre Centre de Service (CS) serait plus envisageable. Encore là, il faudrait mettre en place une proposition qui convienne à tous les milieux. Il y a beaucoup de facteurs qui entre en ligne de compte : les budgets, les autres arts, l’équilibre entre les minutes de spécialistes (éducation physique – anglais – musique (arts) ), etc. Un comité de consultation pourrait être considéré, formé principalement de spécialistes, toutes matières confondues, pour relever ce défi.

Or, pour l’instant, la grille-matière est déterminée par l’équipe-école et adoptée par le Conseil d’établissement. Plutôt que de perdre notre énergie à essayer de réfléchir ou d’agir à grande échelle, il est sûrement plus sage de nous concentrer sur notre (nos) milieu(x) immédiat(s) : notre (nos) école(s).

À plus petite échelle

Dans l’optique de maintenir une place adéquate du cours de musique dans la grille-matière, voire de rectifier le temps alloué à notre matière, notre implication dans notre (nos) milieu(x) scolaire(s) a beaucoup plus de chances de porter fruit.

À mon avis, autant que possible, il est pertinent de devenir membre du Conseil d’établissement (qui est formé de parents, d’enseignants et de membres du personnel de soutien), afin de participer aux décisions de l’école et faire valoir notre matière le moment venu. Si notre horaire est déjà trop chargé ou que la vie familiale ne le permet pas, il est toujours possible d’assister à l’une des réunions afin d’informer les parents à cet effet.

L’idéal serait de se présenter à l’assemblée précédant celle où l’adoption de la grille-matière est planifiée (l’adoption a généralement lieu début février, et donc il faudrait se rendre à la réunion de décembre) Informez la direction de votre intention afin qu’il·elle ajoute votre point à l’ordre du jour.

Une autre idée serait de proposer la formation d’un comité de consultation, composé des spécialistes de l’école, dont le mandat serait de travailler à l’élaboration d’une grille-matière qui serait par la suite proposée à l’équipe-école. En tant que spécialistes, nous connaissons nos besoins au niveau du temps et de l’échéancier pour couvrir notre programme et évaluer adéquatement nos élèves. Plusieurs personnes sont offusquées, avec raison, du fait que leurs collègues titulaires déterminent le temps qui devrait être allouées aux matières des spécialistes alors qu’ils·elles ne connaissent ni le programme, ni les compétences à évaluer. Ce comité devrait être formé en début d’année et être inscrit à notre tâche.

De la parole aux actions

C’est une discussion qui revient tous les ans : comment faire pour valoriser notre matière auprès de nos collègues, des parents, de la société ? Les irritants prennent le dessus dans la conversation, ce qui nous polarise et, au final, draine notre énergie. Notre parole n’est souvent pas entendue.

Et si nous misions plutôt sur les petits gestes au quotidien, afin de faire rayonner la musique dans notre école ? Ce sera une manière concrète de démontrer l’impact positif qu’a le cours de musique sur le développement des élèves.

Voici quelques idées qui contribueront à rendre la musique et son importance plus visibles dans votre milieu :

  • Accorder une partie de votre cours à des jeux de mouvements et physiques : danse, gumboots, rythme et pulsations avec ballons, « bucket drumming », « brain ball », « cup songs », etc. Si c’est connu que dans le cours de musique on bouge, ça réduit l’argument « accordons plus de temps aux matières qui font bouger les enfants ».
  • Organiser une activité parascolaire (si votre tâche le permet). Il faut créer de l’engouement auprès des élèves, un mouvement musical qui suscitera un sentiment d’appartenance.
  • Organiser des ateliers de stimulation du langage via la musique (toujours s’il y a une place à votre horaire). Sans interférer ou s’imposer par rapport au travail des professionnels, des exercices d’élocution rythmique et autres jeux musicaux en lien avec la conscience phonologique pourront certainement être bénéfiques auprès d’élèves avec difficultés langagières.
  • Être visible musicalement lors des événements scolaires. Formez de petits groupes de musique de chambre avec des élèves un peu plus expérimentés afin de pouvoir jouer quelques pièces lors d’occasions spéciales. Exemple : à l’accueil des partisans lors d’un match sportif au gymnase, lors d’une exposition d’arts à l’école, à l’entrée des élèves après le dîner la semaine précédant le congé des Fêtes, etc.
  • Participer à un (des) comité(s), autres que relié à la musique. Ça ne contribuera pas à faire rayonner la musique dans votre école. Cependant, ça donnera un bon coup de pouce à vous faire connaître auprès de vos collègues. En participant à l’essor de votre école tout en développant des relations humaines, cela favorise l’empathie et la bonne entente les uns envers les autres. Et donc lorsque vient le temps des discussions plus épineuses, on est déjà un peu plus à l’aise.

La force de la communauté

Vous semblez seul·e à mener cette quête, c’est-à-dire celle de maintenir ou de bonifier la place de la musique dans la grille-matière. Et pourtant, nous sommes nombreux·ses à marcher dans le même sens et faire les mêmes démarches. Et si nous mettions nos idées en commun ?

Dans votre Centre de Service

Est-ce possible d’organiser une rencontre avec les enseignant·e·s de musique de votre C.S. ? Pour mieux vous connaître, discuter de vos réalités communes, partager votre expérience avec les nouveaux ou les non-légalement qualifiés (NLQ). Il y a peut-être d’autres manières efficaces de remanier les tâches, qui pourrait être proposé à la direction générale ? Ou créer un événement commun visant à valoriser la musique dans toute votre communauté ?

Dans les associations

La Fédération des Associations des Musiciens Éducateurs du Québec (FAMEQ) est un organisme qui vise à soutenir le développement et le maintien de l’éducation musicale au Québec. En devenant membre d’une telle association, nous donnons les moyens à l’association de faire avancer notre cause en notre nom; nous avons aussi accès à de l’expertise, des outils et du soutien. Nous pouvons aussi contribuer de par notre temps et/ou nos idées.

Les réseaux sociaux

Plusieurs groupes existent, notamment sur Facebook. Dans un esprit d’entraide et de bienveillance, nous pouvons échanger du matériel, discuter des aléas du métier et obtenir des conseils et suggestions de la part de gens de cœur aux expériences diverses et provenant de différents milieux.

Votre quartier

Toujours si le temps le permet, faire des ponts avec différents organismes du quartier pourrait certainement contribuer à faire connaître le cours de musique de votre école. Voici quelques idées en vrac :

  • mini-concert dans un C.P.E. ou une résidence pour personnes du troisième âge;
  • organisation d’un atelier musical de style « cercle de percussions » avec des élèves et des membres d’associations telles que le Club des Lions ou les Chevaliers de Colomb;
  • rédaction d’une chronique musicale par des élèves, publiées dans le journal mensuel du quartier;
  • participation musicale au défilé du Père-Noël ou de la Saint-Jean-Baptiste;
  • etc.

Bidou bidou $$$

Je développerai davantage ce volet du cours de musique dans un prochain article, c’est un sujet important que j’aimerais aborder : le (sous)financement d’une classe de musique.

C’est bien connu, une multitude de fonds existent pour favoriser l’activité physique des enfants. Le cours d’éducation physique bénéficie chaque année d’un budget pour rafraîchir le matériel requis.

Or, qu’en est-il du cours de musique ? Les fonds provenant des C.S. et du Gouvernement sont-ils suffisants pour maintenir en état notre flotte d’instruments ? Avez-vous assez d’instruments pour vos élèves ? Dans plusieurs écoles, la réponse est « non ». On fait des miracles pour que nos xylophones et métallophones continuent de résonner !

Il y a le programme « La musique aux enfants » de l’OSM qui participe au développement des cours de musique, lequel nous pouvons avoir accès seulement si nous sommes dans la région de Montréal. Il y a aussi les fonds MusiCounts qui apportent une aide financière précieuse pour l’obtention d’instruments pour notre classe. Il faut par contre déployer du temps pour préparer un dossier pour la demande et ils feront une sélection parmi les candidatures reçues.

Bref, à part le budget de classe reçu en début d’année ne couvrant même pas l’achat d’un xylophone, budget qui est souvent au prorata de notre tâche dans cette école (alors que nous enseignons souvent à 100 % des élèves…), le financement est peu accessible. Et c’est pour ces raisons économiques que certaines écoles sont peut-être tentées de remplacer la musique pour la danse ou l’art dramatique, qui nécessitent un peu moins de matériel spécialisé.

Nous en reparlerons :o)

Une vision plus « Zen » de la situation

Parce que le choix de la grille-matière touche directement notre tâche et donc notre quotidien, il est bien normal que cela nous tienne à cœur. Malgré nous, nous aurons tendance à prendre personnel cette grande décision, surtout si elle va à contre-sens de nos souhaits et valeurs.

Et là le hamster commencera à tourner et s’accélérer. Cette histoire occupera une bonne partie de notre charge mentale. Nous voudrons convaincre, serons parfois sur la défensive. Nous cultiverons inquiétude et déception. La batterie de nos précieuses énergies pourrait se décharger rapidement et être plus lente à se recharger.

On nous dira : « Ce n’est pas contre toi », « C’est normal comme spécialiste de changer souvent d’école », « Un jour tu auras de l’ancienneté qui te permettra d’avoir une meilleure tâche »… On essaiera de vous rassurer… ou pas.

Mais quelle vision défaitiste, me direz-vous ! Julie, tu viens noircir notre profession avec tes propos ! Et pourtant, vous savez que plusieurs vivront une situation semblable, peut-être l’avez-vous déjà vécue. Moi-même, les gens qui me connaissent personnellement le savent, je m’y suis brûlée les ailes…

Il faut apprendre à voir les choses autrement. Ce n’est pas évident car, dans le feu de l’action, il nous est difficile de nous arrêter et de prendre du recul. Faire un retour à soi, respirer, s’ancrer.

On a souvent l’impression que les gens prennent leurs décisions dans le but de nous nuire. Mais pourtant il en n’est rien. Prenons un peu de hauteur pour voir l’ensemble de la situation.

Chaque intervenant a sa vision, ses valeurs, ses objectifs. Il a fallu mettre les idées de tous en commun pour en venir à un consensus. Certain·e·s avaient le bien-être des élèves en tête, d’autres pensaient à la logistique au niveau des ressources humaines, plusieurs voulaient préserver leur tâche, etc. Chacun·e a agi du mieux qu’il·elle pouvait, selon les critères importants pour eux·elles à ce moment-là.

Pour votre part, vous n’avez rien à vous reprocher, vous avez aussi fait de votre mieux. À part vous nuire, les sentiments de culpabilité, de trahison ou même d’abandon vous sont totalement inutiles. Vivre dans le futur non plus. Votre santé mentale est précieuse, vous êtes précieux·se. Soyons bienveillants envers nous-mêmes. N’oublions pas pourquoi nous avons choisi ce métier : faire vibrer les enfants au son de notre musique. C’est là que nous devons tourner notre regard. Revenir à la base, à l’essentiel.

Les ressources destinées au soutien en santé mentale pour les enseignant·e·s sont pour l’instant plutôt rares. J’ai l’idée d’un prochain article dédié à faire découvrir ce qui est disponible. SVP si vous connaissez des ressources, que ce soit sur le Web, une association, un organisme ou une ligne d’écoute téléphonique, notez-les ici dans les commentaires.

Et vous, quelles sont vos idées ?

En tant que spécialiste de musique au primaire, le choix de la grille-matière nous impacte directement. Nous pouvons voir cela de multiples façons, toutes les idées sont bonnes et légitimes, tout dépend de quel point de vue on observe.

On peut se mobiliser en communauté, s’impliquer personnellement dans le processus, laisser la décision aux bons soins de l’équipe-école, concentrer plutôt nos énergies sur le bien-être de nos élèves dans notre classe, etc.

J’ai mentionné quelques pistes tout au long de mon article. Sans doute que vous aussi, avez des idées, des expériences ou des anecdotes à nous raconter à cet effet. Ce serait génial si vous preniez un moment pour nous en faire part ici dans les commentaires, afin d’enrichir notre banque commune d’idées.

Merci d’avoir pris le temps de me lire, au plaisir de recevoir de vos nouvelles !

Julie ♫

Consultez cet article précédent en lien avec la grille-matière :
La grille-matière du primaire expliquée aux parents

Liens vers des outils et documents pertinents en lien avec la grille-matière

Article 22 de la Loi sur l’instruction publique (LIP) quant à la répartition des matières au primaire

Article 86 de la Loi sur l’instruction publique (LIP) quant à l’adoption du temps alloué aux matières

Fiche d’explication sur le temps alloué à chaque matière, destiné à la formation des membres du Conseil d’Établissement

Programme de musique au primaire (Programme de formation de l’école québécoise)

Démonstration du temps alloué au cours de musique : document de travail à adapter selon votre situation (PDF)

Temps alloué au cours de musique
Temps alloué au cours de musique

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